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Histoire de la 3D (1) – Au commencement était le pied.

 

Alors que nous vivons une révolution dans le web qui nous permet de rêver nos projets en 3D, il est avisé de prendre le temps de regarder dans le rétroviseur et de s’intéresser à la grande histoire de la représentation des trois dimensions sur une surface plane. Ce qui semble aujourd’hui une évidence est en fait le fruit de millénaires de recherche, d’expérimentations, de tâtonnement. Ce post inaugure une série qui ambitionne de vous conter cette épopée remplie de fureur et de peinture, un périple qui nous conduit des rives méditerranéennes à la côte californienne.

 

Walk Like an Egyptian

Scène agricole dans la tombe de Nakht

Tout le monde a à l’esprit les représentations de personnages dans l’art égyptien . Le sujet est systématiquement vu de la même façon : tête et membres de profil, corps de face. Toute notion de relief est exclue.

Il n’y a pas de perspective chez les Égyptiens, la taille relative des objets n’est pas dictée par leur distance par rapport au supposé point d’observation. Elle n’est dictée que par l’importance du sujet dans la hiérarchie sacrée.

Le Jardin, fresque du tombeau de Nébamoun

On le voit dans l’œuvre ci-dessus, l’artiste égyptien se livre à une mise à plat du réel. Le jardin est vue de haut, les arbres de côté, leur disposition obéit à une logique propre.

Le style égyptien ne varie que très peu pendant des millénaires. Il n’y a pas de recherche artistique, les œuvres ont une fonction spécifique et sont conçues selon des règles immuables. L’art égyptien vise l’éternel, cela ne laisse pas de place au point de vue.

Euthymidès : un petit pas pour l’homme…

Autour de 500 avant JC, une petite communauté de peintres sur vase va s’illustrer à Athènes. On les nommera rétrospectivement le « Groupe de pionniers ». Cette joyeuse troupe rivalise d’inventivité dans un bel esprit de compétition (ils inventent même le « clash » bien avant youtube en se provoquant mutuellement dans leurs signatures).

Le départ du guerrier (v. 510-500 avant J.-C.)

Parmi eux, Euthymidès nous intéresse particulièrement car on lui attribue une invention qui va tout changer : le raccourci. Jouer sur les proportions des membres permet d’exprimer leur position dans l’espace. En peignant le pied de son protagoniste de face, Euthymidès fait basculer le monde de la peinture dans une nouvelle dimension.

II a fallu des millénaires pour que les hommes de l’antiquité comprennent comment avec un simple artifice on pouvait incorporer une troisième dimension aux peintures. Ce qui nous semble aujourd’hui trivial n’avait en fait rien d’évident pour nos ancêtres dont les priorités étaient d’autre nature.